Qu'est-ce que la maltraitance ?
La maltraitance, la plupart du temps, surgit dans un contexte relationnel caractérisé par une emprise ou un rapport de force. Il convient aussi d’être attentif au contexte social et économique, qui peut favoriser la violence.
Ainsi, la maltraitance ne peut se réduire ou être identifiée au seul comportement d'un adulte ou aux seules atteintes d'un enfant.
On peut dire que « La maltraitance concerne chaque lésion physique ou atteinte mentale, chaque sévice sexuel ou chaque cas de négligence d’un enfant qui n’est pas de nature accidentelle, mais due à l’action ou à l’inaction des parents ou de toute personne exerçant une responsabilité sur l’enfant ou encore d’un tiers, pouvant entraîner des dommages de santé tant physiques que psychiques » (définition équipe SOS Enfants Saint Luc)
Face à cette difficulté de définir la maltraitance, il est nécessaire de ne pas rester seul pour évaluer de lourdes problématiques d’enfants et de familles. En effet, dans bien des cas, des notions telles que l’urgence, la souffrance et dans notre cas, la maltraitance, comportent une part importante de subjectivité. Chacun a son vécu, ses expériences, ses représentations ; ce qui est maltraitant pour l’un ne l’est peut-être pas pour un autre intervenant. En outre, il existe des différences entre les cultures : par exemple, à propos des punitions physiques ou du droit de l’enfant à la libre expression. Dès lors, il importe de pouvoir confronter ses impressions, ses émotions, son ressenti de la situation avec un tiers, si possible à l’extérieur de son cadre professionnel.
Edition 2005 de la brochure équipes SOS Enfants, éditée par l'ONE
Quels sont les différents types de maltraitance ?
La maltraitance physique
Il s'agit de tout traumatisme physique non accidentel infligé aux enfants comme les coups (hématomes, ecchymoses), les fractures, les morsures, les brûlures …ou encore le syndrome du bébé secoué, ou de Munchausen par procuration.
La maltraitance psychologique
Ces types de mauvais traitements se traduisent par des interactions négatives à l'encontre d'un enfant, le dénigrement systématique, le rejet, les menaces, le chantage affectif, l'humiliation, les insultes répétées, les menaces d'abandon, les critiques constantes, l'absence prolongée d'attention bienveillante, le déni des besoins fondamentaux ou de l'existence même de l'enfant, son aliénation dans les situations conflictuelles entre parents, ou à contrario, la séduction, la perversion de la relation.
La maltraitance sexuelle
La maltraitance sexuelle à l'égard d'enfant est définie comme la participation d'un enfant ou d'un adolescent mineur à des activités sexuelles qu'il n'est pas en mesure de comprendre, qui sont inappropriées à son âge et à son développement, qu'il subit sous la contrainte par violence ou séduction ou qui transgressent les interdits fondamentaux en ce qui concerne les rôles familiaux.
La négligence
C’est l’une des composantes de la maltraitance les plus hasardeuses à définir. En effet, dans la majorité des cas où il y a négligence, même importante et de longue durée, on a surtout à faire à l’incapacité, à l’ignorance, à la non disponibilité des parents; si l’effet est bien celui d’une maltraitance de l’enfant, l’intention n’y est pas ! Par contre, il existe bien une minorité de situations où l’environnement de l’enfant veut lui nuire, en omettant sciemment de s’occuper de lui (sévices par omission). Intentionnelle ou non, la négligence se traduit sur différents plans : alimentation, habillement, surveillance, hygiène, éducation, stimulation, recours aux soins médicaux.
La maltraitance institutionnelle
Certaines dispositions légales, certains fonctionnements institutionnels ainsi que certaines pratiques censées apporter aide et de la protection apportées à l'enfant peuvent devenir maltraitantes, notamment lorsqu'elles ne respectent pas le rythme, les besoins et les droits de l'enfant et de sa famille.
Le parcours institutionnel de l'enfant maltraité peut devenir maltraitant: l'instabilité des placements, les retours non préparés en famille, les ruptures, les rejets et abandons successifs, les conflits avec les éducateurs ou les familles d'accueil, les difficultés comportementales, l'agressivité, l'injustice.
Edition 2005 de la brochure Equipes SOS Enfants, éditée par l'ONE
Existe-t-il des signes permettant de déceler la maltraitance ?
Donner une liste de comportements ou de signes permettant de déceler la maltraitance peut être trompeur.
En effet, si dans la pratique nous retrouvons une série de signes récurrents tant physiques que psychologiques, certains enfants, pourtant victimes de mauvais traitements ou d’abus sexuels graves ne vont présenter aucun de ces symptômes. De même, un autre enfant pourra présenter l’un ou l’autre de ces symptômes sans que la cause en soit le mauvais traitement.
Les symptômes et signes d’appel sont, en effet pour la plupart, non-spécifiques de maltraitance. Cette non-spécificité implique d’interpréter ces constats les uns en fonction des autres, et surtout de tenir compte d’une accumulation de ceux-ci. Plus ces éléments sont nombreux, plus le diagnostic est probable et les violences potentiellement graves et chroniques.
En tous les cas, tout hématome ou lésion à répétition sur un enfant très jeune et particulièrement sur les nourrissons, nécessite une analyse plus approfondie tant sur le plan physique que sur le plan relationnel.
Pour plus d’informations, nous renvoyons au livre « L’enfant maltraité, le paramédical, le médecin » , dans lequel l’auteur s’est attaché à décrire les symptômes dans toute leur nuance.
De manière générale, les équipes SOS Enfants s’attachent tant au sentiment de malaise que l’intervenant peut éprouver face à une situation, qu’à des symptômes bien précis. Elles proposent aux professionnels de prendre contact avec elles pour exposer leurs inquiétudes et réfléchir ensemble à la situation.
Que faire face à une situation de maltraitance ?
En vertu du principe d’assistance à personne en danger, et comme l’article 3 du décret le précise, toute personne qui a connaissance d’une situation de danger doit y mettre fin:
Nous sommes bien dans l’obligation de faire quelque chose, activement et positivement, mais pas dans une obligation de résultat. L’intervenant doit mettre en place une action qui vise à faire cesser la maltraitance. Mais, du moins en ce qui concerne les situations de violence et de maltraitance intrafamiliale, l’intervenant concerné peut choisir soit d’agir personnellement, soit de faire appel à un service plus compétent.
Le législateur précise bien que c’est au professionnel lui-même d’estimer si pour remplir son obligation de porter assistance à personne en danger, il doit faire appel à une instance plus compétente.
Les institutions ou services auxquels l’intervenant choisit de signaler l'acte de maltraitance est laissé à son libre choix et ne sont pas énoncés de manière exhaustives. Cela peut être une équipe SOS Enfants, le conseiller de l’aide à la jeunesse, etc…. De même, si cela s'avère plus opportun, l’information peut se faire auprès des autorités judiciaires. Le choix de l'institution ou du service le plus approprié doit être réfléchi. Il doit répondre le plus adéquatement à la situation de maltraitance rencontrée.
En quoi consiste le travail quotidien d'une équipe SOS Enfants ?
Une partie de notre temps est consacrée à la permanence téléphonique assurée durant une bonne partie de la journée. Nous nous efforçons au téléphone de comprendre les raisons de l'appel, les faits, de connaître l'identité des personnes en cause et de découvrir les enjeux sous tendant les appels… Nous sommes bien sûr tenus légalement au secret professionnel.
Nous devrons ensuite éventuellement gérer la crise dévoilée ainsi qu'entamer un travail thérapeutique. Très vite, nous rencontrerons alors la famille. Un rendez-vous sera organisé avec le plus souvent le psychologue et l'assistante sociale. Ce rendez-vous peut se faire 2 ou 3 jours après l'appel, mais aussi parfois le jour même. Nous essayons d'offrir une grande disponibilité.
Le travail thérapeutique est d'une durée très variable. Cela peut se limiter à une rencontre ou durer plusieurs années.
Source : interview d'Evelyne Marchal, Assistante sociale et Coordinatrice de l'équipe SOS Enfants de Charleroi (Interview : Gaëtan de Briey - La Libre Belgique 20 décembre 2002)
Concrètement, comment se passe une prise en charge ?
Le rôle du signaleur est très important.
C'est une personne, un proche ou un professionnel, qui est inquiet pour un enfant.
Il interpelle alors nos services et sert de lien entre la famille et l'équipe.
Dans un premier temps, on lui assure une écoute et on envisage avec lui sa mobilisation auprès de la famille et la manière dont il va nous introduire auprès d'elle. Nous rencontrons ensuite l'enfant et ses proches, entre autres à domicile, pour analyser la situation. Les mesures d'aide sont alors mises en place.
Il peut s'agir d'aides sociales, de thérapies individuelles ou familiales, d'un suivi médical… La famille est toujours mise au courant de nos conclusions.
Source :interview de Marc Minet, Psychologue, coordinateur de l'équipe SOS-Parenfants de Namur. (Interview : Danièle WERION - Familles – avril 2003)
Quelles sont les missions des équipes SOS Enfants ?
Nous essayons d'abord de prévenir les situations de maltraitance grâce à des actions de sensibilisation auprès des familles à risque . Nous effectuons aussi un travail de recherche, pour faire avancer les connaissances au niveau du traitement et de la prévention de la maltraitance. Lorsqu'il y a maltraitance, nous assurons la prise en charge des familles.
Nous établissons d'abord un bilan de la situation de l'enfant. Ensuite, nous apportons une aide personnalisée et appropriée à l'enfant et à ses proches. Nous créons, avec la famille, un espace de parole confidentiel et nous travaillons à une réorganisation familiale, pour éviter les répétitions des maltraitances. Nous travaillons hors du cadre judiciaire. Nous n'avons donc pas de pouvoir de contrainte. Les équipes SOS Enfants sont un lieu de soin, de réflexion, d'écoute et d'aide. Il y a une véritable collaboration entre la famille et nous. Mais tout n'est pas toujours rose. On nous demande parfois de quoi on se mêle.
Source : interview de Marc Minet, Psychologue, coordinateur de l'équipe SOS-Parenfants de Namur. (Interview : Danièle WERION - Familles – avril 2003)
Un signalement est-il automatiquement réorienté vers le Parquet ?
L'objectif du décret de 1991 a été de déjudiciariser la majeure partie des dossiers d'enfants en difficulté ou en danger. L'intervention du judiciaire reste toutefois indispensable en cas de danger grave et imminent pour l'enfant et lorsque la collaboration avec la famille n'est pas possible ou ne suffit pas à faire cesser le danger grave couru par l'enfant.
En pareil cas, les équipes SOS enfants portent la situation à la connaissance du Procureur du Roi qui, seul, peut saisir le Tribunal de la Jeunesse sur base de l'article 39 du décret de l'Aide à la Jeunesse. Le Tribunal peut alors notamment ordonner l'écartement de l'enfant du milieu. Le Service de Protection Judiciaire est chargé de mettre en œuvre le jugement.
Si le signalement est orienté vers la justice, l'équipe SOS Enfants poursuit-elle son action ?
L'intervention des autorités judiciaires n'empêche pas a priori, la poursuite de l'intervention de l'équipe SOS Enfant.
L'intérêt de l'enfant guidera le choix de l'équipe quant à la poursuite ou non de son action. Il s'agira non pas de faire ce que d'autres professionnels font déjà, notamment dans le cadre d'une expertise judiciaire, mais éventuellement de soutenir l'enfant ou la famille, de rester un lieu où leur parole peut être entendue.
L'intervention de l'équipe SOS Enfants est-elle payante ?
L'intervention des membres des équipes SOS Enfants est entièrement gratuite. Les consultations à domicile impliquent également la gratuité des frais de déplacement.
Comment se déroule une intervention de SOS Enfants ?
L'équipe intervient à la demande de tout particulier (enfant, famille, voisin, ...) ou de tout professionnel (médecin, école, PMS, PEP's, SAJ,...) inquiet par une situation d'enfant susceptible d'être en danger. Un rendez- vous est alors rapidement proposé à la personne qui a pris contact, afin de faire une première analyse de la situation. Lors de cet entretien, l'équipe et la personne de contact envisagent l'opportunité d'intervenir et, le cas échéant, les stratégies d'intervention à mettre en place. La question de la protection de l'enfant est également posée.
Dans un deuxième temps, SOS Enfants met en place un espace diagnostique en lien avec le mode de fonctionnement, l'histoire, la culture et le contexte social des différents protagonistes de la famille concernée.
Dans un troisième temps, un suivi thérapeutique de l'enfant et de sa famille est proposé. Ce suivi permet à la fois une recherche de 'sens' et un accompagnement dans l'évolution des relations et du fonctionnement familial.
Source : SOS Enfants-Famille – Place Carnoy, 16, 1200 Bruxelles Tél. 02/764.20.90
Comment entrer en contact avec les équipes SOS Enfants ?
Les personnes confrontées à une situation de maltraitance d'enfants peuvent entrer en contact avec les équipes SOS-Enfants par téléphone, par écrit ou lors d'une rencontre à leur permanence.
En règle générale, les équipes SOS-Enfants ne travaillent pas sur base d'informations anonymes.
Les rendez-vous se prennent habituellement par téléphone, et la consultation a généralement lieu dans les locaux de l’équipe (parfois dans un autre lieu ou à domicile).